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L’autorité et les limites

 
Lors de notre réunion Zoom « Bonjour TDAH » la semaine dernière, une maman m’a posé une question profonde sur l’autorité parentale et l’établissement des limites. Cette interrogation m’a amené à une réflexion nécessitant un peu de temps pour rassembler mes idées et vous proposer une réponse collective et réfléchie.
 
Je crois fermement que, mis à part les distorsions possibles dues à une exposition à des modèles éducatifs violents, nous partageons une vision commune sur la manière dont nous souhaitons être traités par ceux en position d’autorité sur nous.
 
Rappelez-vous, il y avait essentiellement deux types d’enseignants : ceux qui exerçaient une autorité naturelle et ceux qui luttaient pour se faire respecter, souvent à coups de punitions et d’exclusions. Mais qu’est-ce qui constitue cette autorité naturelle, cette présence indiscutable devant laquelle on ne songerait même pas à transgresser les règles ?
 
Cette interrogation soulève une réflexion essentielle sur les fondements de l’autorité et la manière dont elle est perçue et acceptée, tant dans le cadre éducatif qu’au sein de la famille. Elle nous invite à explorer les valeurs et les attitudes qui facilitent une guidance bienveillante et respectueuse, capable de nourrir un environnement propice à l’apprentissage et au développement.
 
Cette autorité naturelle, comme je la perçois, est faite d’un mélange de respect mutuel, de confiance et de compréhension. Elle s’édifie sur l’écoute, sur la capacité à se mettre à la place de l’autre, et sur une certaine empathie qui permet de saisir intuitivement les besoins et les attentes de chacun.
 
Les professeurs qui possédaient cette autorité n’avaient pas besoin de crier ou de menacer. Leur simple présence dans la salle de classe suffisait à instaurer un climat de travail et de respect. Ils connaissaient chaque élève, s’intéressaient sincèrement à leur bien-être et à leur réussite, et savaient reconnaître les efforts, même les plus minimes. Leur autorité était basée sur le fait qu’ils étaient perçus non seulement comme des enseignants, mais aussi comme des guides, des mentors capables d’inspirer et de motiver.
 
Dans le contexte familial, l’autorité bienveillante et respectueuse s’appuie sur les mêmes principes. Elle nécessite de la part des parents une constante remise en question, une volonté de comprendre leur enfant atteint de TDAH et de s’adapter à ses besoins spécifiques. Cela implique de reconnaître que l’autorité n’est pas une fin en soi, mais un moyen d’accompagner l’enfant dans son développement, en lui posant des limites claires et cohérentes, mais toujours expliquées et justifiées.
 
Poser des limites à un enfant TDAH, c’est avant tout lui enseigner à naviguer dans un monde plein de règles et d’attentes, sans pour autant brider sa créativité ou sa spontanéité. C’est lui apprendre à respecter les autres et à se respecter lui-même, à prendre conscience de ses actes et de leurs conséquences. C’est, en somme, lui donner les outils pour devenir un adulte responsable, capable de faire face aux défis de la vie avec assurance et sérénité.
 
L’autorité frontale et la posture d’accompagnement aux côtés de l’enfant représentent deux approches fondamentalement différentes dans la manière de gérer les interactions et de guider le comportement de l’enfant.
 
Voici une explication détaillée des distinctions entre ces deux méthodes. 

L’autorité frontale

L’autorité frontale se caractérise par une approche directe et souvent rigide de la discipline. Elle repose sur le principe que l’adulte détient le pouvoir et impose les règles sans nécessairement tenir compte des besoins ou des émotions de l’enfant. Cette forme d’autorité est souvent accompagnée de commandements, de punitions et de conséquences imposées pour non-conformité.

Les caractéristiques principales incluent :

Imposition des règles : Les décisions sont prises par l’adulte et imposées à l’enfant sans place pour la négociation ou l’explication.
Utilisation de la force ou de la menace : L’obéissance est souvent obtenue par la peur des conséquences plutôt que par la compréhension.
Risque de confrontation : Comme la force appelle la contre-force, cette approche peut mener à des comportements d’opposition ou de rébellion chez l’enfant.
Effacement de l’enfant : Dans certains cas, plutôt que de s’opposer, l’enfant peut se retirer ou se conformer passivement, ce qui peut affecter son estime de soi et son développement de l’autonomie.

Une posture d’accompagnement

À l’opposé, la posture d’accompagnement se concentre sur la compréhension et le soutien des besoins et des émotions de l’enfant. L’adulte se positionne non pas comme un directeur autoritaire, mais comme un guide ou un mentor qui collabore avec l’enfant pour trouver des solutions.
 
Cette méthode promeut ceci :
Écoute active : L’adulte cherche à comprendre les sentiments et les besoins de l’enfant, validant ses émotions et montrant de l’empathie.
Collaboration dans la mise en place des règles : Les limites et les attentes sont expliquées et discutées, permettant à l’enfant de participer à la création d’un cadre structuré.
Encouragement de l’autonomie : En impliquant l’enfant dans les processus de décision, on favorise son indépendance et sa capacité à résoudre les problèmes.
Renforcement positif : Les comportements appropriés sont renforcés par des encouragements et des récompenses sociales, construisant ainsi une relation basée sur le respect mutuel.
 
La différence fondamentale entre ces deux approches réside dans la perception et l’exercice du pouvoir. L’autorité frontale voit le pouvoir comme quelque chose à exercer sur l’enfant, tandis que la posture d’accompagnement voit le pouvoir comme un moyen de responsabiliser l’enfant.
En se mettant aux côtés de l’enfant, l’adulte favorise un environnement où les besoins et les émotions sont reconnus et valorisés, permettant ainsi un développement plus harmonieux et respectueux de l’individu.
 
L’autorité frontale et la posture d’accompagnement partent de présupposés fondamentalement différents quant à la nature du comportement de l’enfant et la manière dont l’adulte devrait y répondre.

Présupposés de l’autorité frontale

 
L’autorité frontale part du principe que l’enfant choisirait délibérément de désobéir ou de défier l’adulte et qu’il faudrait contrer cette tendance naturelle. Selon cette vision, les comportements non conformes sont vus comme des tentatives de l’enfant de tester les limites ou de remettre en question l’autorité de l’adulte. Le dépassement des limites est perçu comme un défi qui nécessite une réponse ferme pour rétablir l’ordre et le contrôle. Dans cette perspective, l’enfant est considéré comme un être capable de se conformer pleinement aux attentes s’il le choisit, et toute déviation est traitée avec correction et discipline.

Présupposés de la posture d’accompagnement

 
En contraste, la posture d’accompagnement repose sur l’idée que l’enfant est en plein processus d’apprentissage et qu’il a besoin de soutien et de guidage pour développer les comportements et les compétences attendus. Cette approche reconnaît que les erreurs, les oublis ou les comportements impulsifs font partie intégrante du développement de l’enfant et qu’ils offrent des occasions d’apprentissage. Au lieu de voir l’enfant comme un adversaire qui défie l’autorité, cette posture le considère comme un apprenant qui, avec un accompagnement approprié, peut comprendre et intégrer les règles et les normes sociales. L’accent est mis sur l’éducation et l’encadrement plutôt que sur la punition.

Implications pratiques

 
Ces différences de présupposés entraînent des approches radicalement différentes en termes de gestion du comportement. Là où l’autorité frontale peut conduire à un cycle de confrontation et de résistance, la posture d’accompagnement vise à construire une relation basée sur la confiance, le respect mutuel et la coopération. En choisissant de se placer aux côtés de l’enfant plutôt que face à lui dans une posture d’opposition, l’adulte ouvre la voie à une dynamique relationnelle où l’apprentissage et le développement peuvent prospérer dans un climat de sécurité affective et de compréhension mutuelle.
Le choix entre ces deux approches reflète une philosophie éducative profonde et une vision de la nature de l’enfance et du rôle de l’adulte dans le développement de l’enfant. Reconnaître que l’enfant est un apprenant en développement, et non un adversaire délibérément provocateur, peut transformer la manière dont nous interagissons avec lui et favoriser un environnement où chaque enfant a l’opportunité de grandir et d’apprendre dans le respect et l’harmonie.

Exemple

Cette même maman m’explique que son fils ne respecte pas les limites et que par exemple, quand elle est au téléphone, il l’interpelle sans fin sans tenir compte qu’elle lui demande d’attendre la fin de sa conversation
 
Dans un esprit de discipline frontale, la réaction de la maman face à son fils qui l’interpelle sans cesse pendant qu’elle est au téléphone pourrait se manifester de plusieurs manières, reflétant l’approche basée sur l’autorité et le contrôle direct.
 
Voici comment elle pourrait réagir :
Interruption ferme : La maman pourrait interrompre brusquement sa conversation téléphonique pour adresser un avertissement sévère à son fils, en utilisant un ton de voix élevé et des mots qui expriment sa frustration et son désir de faire respecter immédiatement les règles. Par exemple, elle pourrait dire : « C’est assez ! Je t’ai déjà dit d’attendre que je finisse de parler au téléphone. Tu n’écoutes jamais ! »
 
Punition : Après l’appel, elle pourrait choisir de punir son fils pour ne pas avoir respecté la limite qu’elle avait posée, en associant son comportement à une conséquence négative. La punition pourrait prendre la forme d’une privation de quelque chose qu’il aime, comme l’usage de jeux vidéo, regarder la télévision, ou une activité de loisir préférée, en espérant que cela le dissuade de répéter son comportement.
 
Réprimandes : La maman pourrait se concentrer sur des réprimandes verbales, soulignant le mécontentement et la désapprobation de l’action de son fils. Elle pourrait insister sur le fait que son comportement est inacceptable et qu’il doit apprendre à respecter quand on lui dit d’attendre.
 
Imposition de règles sans discussion : Elle pourrait renforcer la règle de ne pas interrompre pendant les appels téléphoniques en réitérant la règle de manière autoritaire, sans offrir d’explication ou de compréhension pour le besoin de son fils de communiquer à ce moment-là. Elle pourrait simplement insister sur l’obéissance sans chercher à comprendre le pourquoi du comportement de son fils.
 
Dans cette approche, l’accent est mis sur la conformité immédiate et la correction du comportement par le contrôle et la discipline. La réaction ne tient pas compte des raisons sous-jacentes pour lesquelles l’enfant pourrait avoir agi de la sorte et ne vise pas à développer chez lui une compréhension interne des comportements appropriés. L’objectif principal est de rétablir l’ordre et de faire respecter l’autorité de l’adulte.
 
L’autorité frontale et la posture d’accompagnement représentent deux approches distinctes dans l’éducation des enfants, chacune avec ses propres caractéristiques et résultats.
L’autorité frontale est souvent perçue comme une méthode disciplinaire plus traditionnelle, où le parent impose des règles et des conséquences claires. Cette approche peut mener à une discipline « dramatique », car elle repose sur l’autorité et le contrôle pour obtenir la conformité de l’enfant. Bien que cette méthode puisse être efficace pour établir des limites et un ordre, elle peut aussi créer une séparation émotionnelle entre le parent et l’enfant. Cette séparation peut résulter de l’usage de la peur, de l’intimidation ou de la punition comme moyens de contrôle, ce qui peut affecter négativement la relation parent-enfant et ne pas encourager l’enfant à comprendre les raisons derrière les règles.
 
En contraste, la posture d’accompagnement est une approche plus moderne de la discipline, qui met l’accent sur la connexion, la communication et la compréhension mutuelle. Cette méthode cherche à éduquer l’enfant sur les conséquences de ses actions dans un contexte de soutien et de respect mutuel. Elle vise à renforcer la relation parent-enfant par l’empathie, l’écoute active et la résolution de problèmes ensemble. Au lieu d’imposer simplement des règles, elle implique l’enfant dans le processus de prise de décision, aidant à développer son sens de la responsabilité et son autonomie. Cette discipline « sans drame » est basée sur la connexion émotionnelle et le respect mutuel, ce qui favorise un environnement familial plus harmonieux et une meilleure compréhension entre parents et enfants.
 
En résumé, tandis que l’autorité frontale peut conduire à une discipline basée sur le contrôle et potentiellement créer une distance émotionnelle entre le parent et l’enfant, la posture d’accompagnement favorise une approche de discipline positive qui renforce la relation et encourage la croissance personnelle de l’enfant dans un cadre respectueux et aimant.

Dans l’esprit d’une approche d’accompagnement

J’ai suggéré à la maman de reconnaître et d’accueillir le désir de son enfant de communiquer, plutôt que de le repousser en lui demandant d’attendre. Pour y parvenir, il est possible d’établir un code entre eux. Par exemple, l’enfant pourrait poser sa main sur le bras de sa maman pour exprimer son besoin d’attention. En réponse, la maman pourrait lui adresser un clin d’œil ou un autre signe, signalant ainsi : « Je remarque que tu souhaites me parler, et je serai entièrement à ton écoute très bientôt. »
 
Vous constaterez une transformation dès l’instant où l’enfant se sentira reconnu et écouté, même sans avoir prononcé un mot. Ce simple échange non verbal peut créer un pont de compréhension et de respect mutuel, renforçant ainsi le lien entre la mère et l’enfant tout en respectant les besoins de communication de ce dernier. La maman m’a dit que cela avait super bien fonctionné.
 
C’est la magie de la discipline sans drame ✨
 
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